Retour au pays

-Je te remercie, elle fera couler le sang des traîtres je peut te le jurer.

Une nouvelle vague de sensation s'emparer à nouveau de lui. Le sang dans ses veines devint glacial, peut être cela lui permettait-il de mieux accepter de tuer autrui, d'avoir la conscience tranquille, il ne savait pas et n'en avait cure. Il n'exprimer jamais de regret à liquider quelqu'un, ils méritaient la mort à chaque fois.

-Maintenant je vais aller voir cette Salvia si elle peut quelque chose pour moi.

Après un bref salut de la tête, il se retourna vers l'entrée et vers le guide qui l'avait mené ici. D'un regard il lui demanda le chemin jusqu'à la guérisseuse.

Avec un sourire narquois, l'homme fixa Reobryn et désigna d'un signe de tête la blessure.

"ça fait mal ? Eh bien, je suis terriblement désolé !" dit-il d'un ton ironique.

"Allez, amène-toi. La... guérisseuse saura s'occuper de toi."

Il guida Reobryn jusqu'à une cabine au fond du vaisseau et lui désigna la porte.

"C'est ici... Et maintenant, je vais te laisser... N'hurle pas trop !" lui recommanda-t-il, l'air machiavélique, avant de remonter sur le pont...

-T'excuse pas, charogne, si je me souviens bien tu as été le premier a geindre en me suppliant d'arrêté le combat.

Il suivit l'homme de main jusqu'à la porte, et lui décocha un regard meurtrier suite à la remarque sarcastique du bonhomme.Tout cela ne lui disait rien qui vaille, que voulaient-ils tous dire à propos de cette «guérisseuse» ? Il était évident qu'elle devait vénéré une divinité maléfique. Reobryn fixa la porte un bon moment, en ce demandant comment elle pouvait lui venir en aide si elle le faisait souffrir. Il toqua à la porte en se disant que si elle tentait quoi que ce soit il la tuerait. Bien sûr cela compliquerait beaucoup de choses, Mordwain n'accepterait pas un deuxième «accident» dans son équipe. Il attendit que quelqu'un vienne l'ouvrir.

Quelques bruits de pas, puis la porte s'ouvrit sur une femme d'une trentaine d'année, aux longs cheveux noirs de jaix et vêtue de vastes parures dont les teints variaient entre le pourpre et le rouge sang.

Son visage paraissait pour le moment neutre, bien qu'il émane une grande sensualité de ses yeux verts, alors qu'elle jaugeait Reobryn du regard.

Elle s'exprima d'une voix douse et mélodieuse, offrant un contraste saisissant avec le ton rugueux des hommes de main qui traînaient dans le coin.

"Oui ? Vous êtes une nouvelle recrue j'imagine. Que puis-je faire pour vous ?"

S'attendant à une vieille harpie fagotée comme une chouette, Reobryn fut agréablement surpris par la femme qui lui faisait face.

-On peut dire ça comme ça. Mordwain m'a dis de venir vous voir, il paraît que vous êtes un peu guérisseuse.

Au même moment il retira sa main poisseuse de sang de sa blessure afin qu'elle puisse y jeter un oeil.

-Faîtes ça bien».

Cela sonnait un peu comme un avertissement,au cas où elle envisagerait de se défouler sur lui.

La femme lui offrit un sourire radieux.

"Oh je vois... Quelle vilaine blessure ! Venez, nous allons nous en occuper."

Elle invita Reobryn dans sa cabine et le fit s'installer sur un lit de fortune certainement destiné à ses "patients", puis elle releva le vêtement poisseux de sang et jeta un coup d'oeil à la blessure.

Elle fit un grimace et se releva.

"Eh bien, ce n'est pas du joil ! Attendez, je vais chercher ce dont j'aurais besoin." lui dit-elle, toujours souriante, avant de se diriger vers son armoire.

Il grimaça au moment de s’allonger sur la couche, la douceur le lançait mais il s’estimer heureux de ne pas avoir de fièvre. Encore une fois il serra les dents lorsqu’elle lui releva sa chemise mais resta impavide, jamais il ne laisserait à personne le plaisir de voir souffrir ou suppliant. Reobryn faillit répliquer qu’elle ne lui apprenait rien en lui révéla l’état de sa blessure. N’étant pas genre d’homme a succomber à sa première impulsion, il garda sa réflexion pour lui. L’heure n’était pas à vexer cette femme dont il ignorait tout ou presque. D’ailleurs était-elle vraiment guérisseuse ou une catin ayant des notions en premiers secours ? Il la détailla pendant qu’elle lui tournait le dos, mais ne trouva rien de spécial à première vue. L’homme ne comprenait pas les railleries des autres à son sujet, ils s’était sûrement foutue de lui mais l’enfant de putain lui paierait ça un jour ou l’autre. On se ne moquait pas de lui impunément. Il en revint à Salvia et lui dit :

-Alors vous aller me faire quoi ?

La femme ne lui répondit pas immédiatement. Elle prit son temps pour choisir divers flacons et ustensiles dans son armoire avant de revenir vers Reobryn.
Elle conservait sous sourire, mais au fond de ses yeux, on lisait une certaine gravité. Non pas que la blessure était à ce point mauvaise, mais elle savait parfaitement ce qu'elle faisait ou du moins, en donnait l'impression.

- Je ferai ce que j'ai à faire, ni plus, ni moins.

Sur ce, elle ouvrit l'un des flacons qui dégagea une odeur peu avenante. Se servant d'une spatule et d'un doigté expert, elle étala le baume sur la plaie, ravivant d'un coup la douleur. Il ne fallut cependant pas une minute avant Reobryn eut l'impression d'une brûlure qui lui rongeait la peau, à croire qu'au lieu de guérir cette folle était en train de l'achever.

Salvia laissa là l'homme, retournant à son armoire.

Reobryn la regarda faire son soin avec une mine impartiale mais déchanta vite lorsqu’il sentit le feu lui dévorant le corps. Il tressaillit de douleur mais se redressa sur ses jambes mal assurées pendant qu’elle lui tournait le dos. La main sur la garde de son épée courte, il cracha :

-Que ma tu fais Chienne ! Sorcière !

En dépit des apparences il ne l’attaqua pas, il sentait comme un tison brûlant pénétrant et calcinant ses chairs. Il se rassit sur la couche et attendit.

La "sorcière" se retourna, haussant à peine un sourcil devant l'attitude menaçante de Reobryn. Manifestement, elle n'était guère impressionnée par son petit effet. Cela sembla même l'amuser.

- Taisez vous donc. Votre attitude est puérile.

Le ton était celui qu'elle aurait sans doute pris pour réprimander un enfant tandis qu'un perpétuel sourire ornait ses lèvres. Folle ou pas, apparement seule cette femme savait ce qu'elle utilisait comme baume et Reobryn serait forcé de lui faire confiance à moins de trouver une meilleure solution.

Elle revint avec trois bandes de tissus enduites d'un autre baume malodorant qu'elle posa sur la blessure, puis, banda le tout. Peu à peu, la douleur s'atténua pour laisser place à une douce sensation de chaleur réconfortante.

- Aussi sale soit-elle, la plaie cicatrisera bientôt si vous avez la sagesse de ne pas la rouvrir. Revenez donc dans la journée de demain pour que je puisse y jeter un oeil et changer les pansements.

Le roublard inclina la tête sur le coté satisfait qu’elle ne l’ai réellement empoisonné.

- Et bien on peut dire que vous savez y faire,, lâcha-t-il ironique la voix rendu sèche par la cuisante douleur.

Reobryn se rhabilla lentement en veillant à ne pas toucher aux pansements. Ensuite il se dirigea vers la sortie, ce faisant il passa près de la « guérisseuse » en posant sur elle un regard froid. Sur le pas de la porte, il se tourna une dernière fois vers la femme en hocha la tête en guise de salut, voire peut-être un remerciement, avec lui on ne pouvait pas vraiment savoir.
Dans le couloir il retrouva la canaille avec qui il s’était battu, il s’approcha lentement vers lui


-Dis moi où je peut trouver Cobos.

L'homme était en discussion animée avec une autre personne. Discussion qui s'interrompit brusquement à l'arrivée de Reobryn.

- Nous reparlerons de cela plus tard.

L'autre poussa un grognement et parti sans laisser au roublard le temps d'identifier son visage.

- Eh ! Prends pas ce ton, l'ami. Tu es ressortit vivant de chez la Salvia ? Quel courage !

Inutile de nier l'ironie qui habitait ces paroles. Cependant, il redevint sérieux au bout d'un bref instant.

- Tu dois traiter affaire avec ce vieux Cobos, mmh ? Et bien je pense que tu n'auras pas besoin d'aller très loin puisqu'il est là en ce moment. Viens, suis moi.

Sur ce, il se détourna et commença à avancer sans se préoccuper de l'avis de l'ancien bagnard.

L'homme mena Reobryn dans les calles du bateau où il frappa à une porte en bois. Il n'obtint aucune réponse, mais ouvrit tout de même, s'effaçant pour laisser passer Reobryn.

A l'intérieur de cette petite pièce qui n'avait guère plus de deux mètre sur deux, on avait réussi à caler une lourde table de chène et une chaise sur laquelle était assis un homme de forte carrure. Cobos, si c'était bien lui, était un colosse d'une quarantaine d'années au visage carré, encadré d'une crinière poivre et sel, où venaient s'incruster deux yeux noirs qui fixaient Reobryn d'un air peu avenant.

- Veuillez décliner la raison de votre présence. Et fermez moi cette porte !

Reobryn haussa un sourcil devant le ton qu’employer Cobos puis ferma la porte du talon sans regarder si elle était bien refermer.

- Je viens de la part de Mordwain, on va dire que je suis temporairement à son service en échange d’un service. Il m’a dit que t’étais la personne à aller voir pour du boulot, alors me voilà. J’espère que tu vas me donner une affaire où le sang doit couler, il faut que je me refasse la main, ajouta-t-il sardonique.

Le colosse fixa un instant Reobryn en silence pendant quelques instants avant d'afficher un semblant de sourire.

- Je vois. On a effectivement du en toucher un mot.

Nouveau silence pendant lequel Cobos jugea l'autre du regard, puis lança à coup d'oeil vers la porte. Enfin, il se décida à parler.

- Faire couler le sang ? Vous ferez bien de contrôler votre lame où vous ne ferez pas long feu. Combien de temps que vous êtes resté à l'ombre ?

La question n'en était pas une, juste une manière de remettre le roublard à sa place. Dans cette pièce, c'était Cobos qui donait les ordres, et il ne permettrait à personne d'autre de le faire à sa place.

- Bien ! Sachez vous montrer discret et tout se passera bien. L'homme est plus invisible qu'une ombre, et rusé comme un renard. C'est d'ailleurs comme ça qu'il se fait appeler : le Renard. Un indépendant qui a travaillé un temps pour nous. Il est aujourd'hui le seul à connaître un code qui doit nous revenir. Il s'agit de le faire parler.

Cobos laissa Reobryn prendre bien conscience de la tâche.

- Des questions, avant que je continue ?

C'était tout sauf aimable, mais il faudrait apparement s'en contenter.

Cobos sembla satisfait du silence de Réobryn. Sans doute possible, l'homme le testait, et rien ne laissait présager qu'il aurait droit au moindre faux pas.

- Ce fichu Renard est, comme je vous l'ai dit - tachez de ne pas l'oublier ! - rusé. S'il se sent menacé, il se laissera tuer emportant le secret dans sa tombe, alors vous êtes prié de vous montrer plus fin que lui.

Reproche perceptible dans le ton de la voix.

- Rendez-vous aux docks et demandez si la Luna et prête à amarrer.

Cobos n'ajouta plus rien, laissant planer un silence quelque peu pesant.

Les consignes étaient claires seulement quelques précisions techniques manquaient d’être éclaircis. Reobryn lui en fit part.

-D’abord est-ce qu’on sait où ce Renard traîne, une gargote par exemple ? Ensuite aux docks je l’annonce à qui le code ?

Sans ces précisions il se voyait mal arpenter les docks de long en large en demandant si la Luna est prête à amarrer. Cela manquerait singulièrement de discrétion.

Cobos afficha un sourire satisfait.

- Parfait. L'ombre ne vous a pas totalement ramolli l'esprit, c'est plutôt un bon point. Soyez assez sage pour garder cette disposition au cours de votre mission et peut-être que vous pourrez redevenir quelqu'un !

Il acquisça à ses propres paroles, en parfait accord avec lui-même sur ce qu'il venait de dire.

- Vous vous adresserez à Brogor. C'est lui qui s'occupe des autorisations d'amarrage vous le trouverez donc sans grande peine.

Cobos se leva ensuite, désignant la porte.

- Fichez moi le camp, à présent, j'ai d'autres chats à fouetter !

Le premier officier venu en question fut tellement surpris par le ton et l'apparence de Reobryn qu'il resta un moment sans réaction. Moment de courte durée, cependant, le temps que les rouages de son cerveau se remettent en marche.

- Ah, oui certainement, mais je ne peux pas le déranger, en principe. Vous aviez annoncé votre visite ?

Le ton était celui très aimable et faux de celui qui craint de froisser l'autre, mais n'ose pas non plus obtempérer, de peur de faire une bêtise.

- Au pire, sinon, vous pouvez toujours me laisser une missive que je lui remettrai dès qu'il sera disposé ? Vous reviendrez chercher la réponse demain...

Un sourire poli étirant ses lèvres, il ouvrit déjà la main, prèt à receptionner ladite missive et à règler la question au plus vite.

Reobryn adopta une moue contrariée qui en général n'était pas bon signe, il regarda la main tendu comme s'il allait craché dedans.


-Ecoutez on s'est mal compris, c'est peut être moi qui me fait mal comprendre je sais pas. Je n'ai pas de missive mais je dois lui parler au sujet d'une affaire de la plus haute importance. C'est rentrer dans vot' petite tête de fonctionnaire là?

Il posa sa main sur le pommeau de son épée et l'autre sur sa hanche et le fusilla du regard.

L'homme blêmit brusquement. Apparement, le courage ne devait pas faire partie de ses nombreuses qualités et il n'osait pas tenir tête à la menace.

- J-je vais voir ce que je peux faire pour vous. N-ne bougez pas, je reviens dans un instant.

Malgré le teint étrange qu'il avait prit, il restait d'une politesse protocolaire remarquable, comme si il allait piocher chacune de ses phrases dans un lot prédéfini.

Il disparut rapidement par une porte derrière lui, abandonnant son petit bureau. Reobryn put entendre les rumeurs d'une conversation plus ou moins houleuse, puis le fonctionnaire ressortit, suivit de près par un autre homme aux allures de docker endurci. Il avait probablement dépassé la quarantaine, mais sa prestance était intacte. Il n'inspirait pas forcément confiance, mais ne donnait pas non plus envie de l'avoir comme opposant.

- Ouais ?

Reobryn regarda le téméraire employé aller chercher son patron, voir sa mine déconfite lui avait remis du baume au coeur. Impressionner les gens comptait beaucoup pour lui car un homme qui a peur perd ses moyens et donc a moins de chance d'être une menace. Il observa avec attention Brogor et se douta que c'était le genre d'homme qui avait fait ses preuves et qui était surement bon combattant. Il lui fit un signe de salut de la tête et dit enfin :


-La Luna était-elle prête à amarrer?

Il s'attendit à une lueur de compréhension dans les yeux de l'ancien marin devant l'énonciation de ce code.