Retour vers le cirque

Ces paroles lui étaient vaguement familières, sans qu’elle puisse déterminer quoi exactement. Garder la foi! Voilà ce que l'elfe reteint de cette phrase. Avoir foi en la vie, en soi, en son dieu. Vivre sans colère était, par contre, chose très difficile, mais faisable. La rôdeuse avait encore du chemin à parcourir avant d’atteindre une complète sérénité de l’âme. Ce qui l’amena à penser à l’assassin, qui n’était apparemment pas près d’atteindre cette étape et de loin. Elle pris alors conscience qu’elle devait être plus prudente. Même si elle doutait fort de sa capacité à détecter une attaque de l’homme, elle pouvait toujours adopter son attitude de la forêt. Agir en rôdeuse, un atout pour sa survit, était mieux que de déambuler ainsi sans la moindre prudence aucune.

Bien qu’elle avait noté leurs présences plus tôt, Amarillys prit pleinement conscience de la présence de Kaine et Conrad. Par esprit de prudence, elle attendit qu’ils soient à sa hauteur avant de continuer son chemin. Tout en étant raisonnablement attentive à son environnement, Illys s’adressa aux deux hommes, personnes qu’elle considérait maintenant comme des compagnons de route. L’adversité créant des liens. Et, une équipe, même créer de force, devait se tenir les coudes. Elle s’adressa tout d’abord à Kaine.

« Je tiens à vous remercier pour vos soins. Je me rends compte que je n’en ai rien fait. Vous avez probablement sauvé la mobilité de mon bras. Alors! Merci! »

Elle se tourna ensuite vers Conrad. Elle lui posa à nouveau la même question, mais cette fois-ci avec une sincère inquiétude. La moquerie ayant un effet neutralisateur sur sa peur du moment, elle avait trouvé refuge dans la mésaventure de Conrad. Et, elle espérait qu’il l’avait compris.

« Comment allez vous? Rien de casser? Vous n’avez pas eu ce que l’on peut décrire comme une bonne journée. »

Tout le long du trajet jusqu'à être à la hauteur d'Amarillys, le ménestrel n'avait dit mot. Il s'était contenté d'avancer de manière machinale.

Amarillys était là à présent mais à vrai dire, le ménestrel n'avait pas vraiment bien pris ses dernières remarques à son encontre.
En l'entendant parler au prêtre, il se dit qu'il était de nouveau mis à l'écart mais à vrai dire, il s'en moquait à présent. Tout ce qu'il souhaitait était d'oublier toute cette histoire mais il savait en son for intérieur que rien ne serait comme avant tant que l'assassin de Cassandra ne serait pas neutralisé.
D'ailleurs, Cassandra n'était plus... Il avait perdu une amie...

Puis l'elfe le tira de ces pensées négatives et, dans un certain sens, il aurait pu le remercier dans d'autres circontances.

Il posa son regard fatigué et las sur son interlocutrice puis lui répondit d'une voix monotone.

"Comme vous dîtes... J'ai connu des jours bien meilleurs..."

Il n'était guère agressif dans ses parôles car elle lui avait évité de sombrer dans des sentiments de désespoir et en cela, il lui en était reconnaissant mais il n'avait pas non plus oublié les remarques déplaisantes de cette elfe.

L'elfe ne continua point sur le sujet, qu'elle croyait être encore délicat, bien que Conrad semblait amical envers sa personne. Profitant du mutisme général, Illys partagea une idée qui lui avait passé par la tête.

" J'ai été à même de constater la rage qui consume l'assassin, tel que le disait la voyante, et j'en suis venue à penser à une autre théorie. Nous n'avons rien qui relie vraisemblablement les victimes entre elle, physiquement ou religieusement. Mais, cela pourrait être intérieur. Est-ce que vous croyez possible que cet homme puisse puiser son énergie à même la rage des autres? Plus la rage est enfoui, d'une source profonde, plus la colère est intense, plus la personne est une victime de choix. Ce n'est qu'une théorie. Qui plus est, un brin tiré par les cheveux, mais mieux vaut explorer toutes les possibilités. Quant dites vous?"

L'elfe bifurqua à gauche, toujours en direction du cirque.

[HRP : quel succès... bon ben je reprend :]

Illys retrouva la grande place occupée par le cirque. Dans l'obscurité, les tentes n'étaient plus que de grandes masses sombres indistinctes. Alors qu'elle faisait ses premiers pas dans le cercle, une lumière éclaira vivement son visage sur la droite.

Jaillit de nulle part, Marti le grizzli brandissait une lanterne, l'arbalète sur l'épaule.

"Heureux de vous voir saufs. Alors, quelles nouvelles?"

Le jeu d'ombre et de lumière donnait un tour inquiétant à son visage buriné. L'elfe pouvait noter qu'il n'e les avez pas accueillit par un "ha, c'est vous" ou autre, signe qu'il les avait vu venir.

L'elfe du prendre un temps d'arrêt, histoire que ses pupilles s'ajustent à la subite manifestation de la source lumineuse. Elle n'était pas surprise outre mesure, que Marti les ai vue venir. Il était rôdeur après tout.

" Sain et sain, oui, mais de justesse. J'ai eu le droit à une rencontre en particulier. Pour ce qui est des nouvelles. Nous sommes au point mort."

Illys raconta tout ce qu'elle avait vue et entendu, sans trop omettre de détails, à Marti. Elle n'exposa que vaguement les bévues de Conrad. Elle mentionna le principal: le minotaure, la voyante, le médaillon d'ivoire, la planque à la fontaine, la bataille et la nouvelle piste que Kisas suivait. Ses deux compagnons, qui semblaient tout deux renfermés dans un mutisme de fatigue, auraient toujours le loisir de raconter leur version s'ils le voulaient.

Au cours de son exposé, Amarillys laissa la chance à Marti d'intervenir à sa guise. Elle montra son médaillon, sa blessure et exposa de nouveau sa toute dernière théorie. Voulant l'avis de quelqu'un.

Marti secoua ses vastes épaules, impressioné.

"Faudra que je vienne avec vous la prochaine fois, on a pas l'air de s'ennuyer..."

Quand Illys lui montra le médaillon, le barbu plissa les yeux pour percer la pénombre. Au bout de cinq petites minutes, il relâcha ses paupières, comme s'il venait de se livrer à un exercice mystique.

"Hé, j'ai déjà vu ça quelque part, cet oeil... ce monogramme m'est familier. P'têt une signature? Euh, sinon vous dites 'puiser dans la rage des victimes'? euh, ça veut dire que ces gens étaient secrètement en colère? Qu'est-ce qui vous fait croire ça?"

Ce genres de chose dépassaient un peu l'humble trappeur qu'il était. Quand à l'oeil sur le collier, en effet peut-être qu'un érudit pourrait y reconnaître quelque chose.

" Franchement, je n'en sais trop rien! Je me demande seulement comment il choisit ses victimes. Car, j'ai l'intime conviction que même le plus fou des fous ne tue pas sans raison. Peu importe que la raison soit logique ou non et que l'assassin en soit conscient ou non. Il va de soit que ma théorie ne se base sur rien de bien concret par contre."

L'elfe marcha un bref instant.

" Qui a-t-il de neuf de votre côté? Comment va le patron et les gens du cirque?"

Kaine avait suivit le petit groupe en silence, il n'avait prononcé mot, perdu dans ses pensées. Beaucoup de choses s'y mélangeait, des évènements de la journée et du passé... Le tueur leur avait filé entre les doigts, cela c'était joué à pas grand chose, le maudit avait réussit cet exploit uniquement grâce à une panoplie de gagdets impressionnantes.

Il fallut qu'Illys présente deux fois sa théorie avant que Kaine ne percute tant il était ailleurs. Ce qu'avait dit l'elfe impliquerait que l'homme ne tuait que des personnes haineuses ou rageuses ? Cela ne collait pas vraiment avec le caractère des victimes. il se pouvait que l'assassin ne soit qu'un psychopathe et frappe complètement au hasard juste pour assouvir une envie de meurtre. Quoique ce n'était pas logique non plus, car si la voyante avait pu savoir qu'elle victime il allait tuer c'était que son acte était prémédité.

Donc on avait à faire à une tueur organisé et méthodique qui canalise sa rage d'une manière froide et chirurgicale... En fait les enquêteurs tournaient un peu en rond, car à part ces maudites traces de suie et une arme déchargée ils n'avaient rien...

Adahan soupira, dépassé par le nombre de possibilités... Mais il ne s'avouait pas encore vaincu, loin de là. Du coin de l'oeil il apperçu le médaillon d'Illys. Le symbole lui disait quelque chose, peut-être pourrait-il s'en rappeler en le voyant de plus prêt.

"Dame elfe, pourrais-je regarder un instant votre médaillon ?"

Marti soupira, l'air un peu abattu.

"L'ambiance est morose, vous imaginez bien. On a tous le moral dans les bottes, mais la vie continue. La plupart des gens oscillent entre tristesse et inquiétude."

Beaucoup devaient avoir peur que le tueur revienne. Mais Illys pouvait déjà prédire que s'il revenait, ce ne serait pas pour n'importe qui...

Au milieu de l'obscurité, Khaine examina le médaillon. L'oeil avait tout l'air d'être un glyphe protecteur, mais il n'était pas elfique, alors pourquoi le texte inscrit au dos était-il justement en elfique? Si c'était magique, ce genre d'assemblage bizarre était rare. Khaine savait que la fabrication d'objet magique répondait à des critères très précis. Donc le créateur du médaillon n'était certainement pas un novice. Dommage que la mémoire de Marti lui fasse défaut.

" Au moins, maintenant il n'attaquera plus personne parmi vous. Pour le moment, toujours est-il." Dit-elle, morose, plus à elle-même qu'aux autres.

Dans quel bourbier me suis-je fourrée? Je n'ai pas le choix, je dois le trouver avant qu'il ne me trouve. J'ai l'art de me contredire, semble-t-il.

" Adahan!! Conrad!! Vous qui êtes, tout deux, plus familier avec le monde magique que moi. Quelles sont les raisons pour laquelle une personne collectionnerait des âmes? Avez vous une petite idée? Et quel tour de magie peut bien avoir réduit l'effet dommageable de nos armes? Nous devons absoluement découvrir ce qu'il trame et lui trouver un point faible. Qui plus est, je ne dois plus me retrouver seule. Il est trop puissant pour moi et même contre un groupe, il est dur à cuir."

Voilà un étrange médaillon entre les mains blanches de Kaine. Deux styles de frabrication semblaient avoir étaient mélangés : L'elfique pour les gravures et un autre pour sa conception physique (et magique ?). Un glyphe sans nul doute, peut-être conçu par deux personnes associées, un forgeron et un magicien elfe ? Il le rendit à Illys.

"C'est un curieux objet que vous avez là. L'oeil ouvert symbolise souvent la protection, le gardien, je vous conseille de le garder tout le temps sur vous. Mais il n'est pas de fabrication elfique alors je n'explique pas la phrase gravée dessus..."

Un mystère de plus dans sa tête, voilà qui commençait à faire beaucoup. Il allait rejoindre de nouveau le silence lorsque qu'Illys s'adressa à lui et à Conrad, au sujet de magie. Voilà qui lui était plus familier.

"Il pourrait collectionner des âmes pour les offrirs à une conscience supérieure maléfique, à une liche pour leurs sortilèges nécromentiques ou encore pour enchanter une arme... Il peut aussi les utiliser pour se renforcer lui même, l'essence vitale cumulée pourrait le rendre purement et simplement immortel, c'est pour ça qu'il faut l'arrêter avant qu'il ne soit trop tard."

Kaine marqua une pose, il pensa à quel sortilège l'assassin avait pu utiliser, il y'en avait des centaines concernant la protection !

"Les sorts qu'ils pourraient utiliser sont nombreux... Cela pourrait être une Peau de Pierre, ou un bouclier quelconque, je ne l'ais pas vu en action, c'est difficile à juger. Et si il se sert des âmes qu'il volent pour se renforcer cela peut très remplacer n'importe qu'elle armure ! Ca le rendra plus fort, plus rapide et plus résistant... Peut-être cherche t-il la perfection ? Peut-être a t-il dans son passé échoué sur quelque chose et il ne souhaite plus jamais faillir, alors il se nourrit du talent des autres pour devenir parfait... Une hypothèse de plus."

Liche, nécromencie, immortel, maléfique, ça fait beaucoup de mots qui font peur. Marti secoua la tête.

"Beuh, ça fout les jetons, non? On est peut-être déjà hors du coup... Mailikki, comment peut-on arrêter ça? Quoiqu'il arrive, il y a des morts qui ne resteront pas impunies... Il soupira, las. Je retourne à ma veille. Je crois que je suis devenu insomniaque. Vous savez où me trouver."

Le grizzli s'éloigna dans la nuit les laissant seul. D'ailleurs il ne devait pas être le seul à ne pas dormir. Au milieu de l'obscurité, une bougie cillait à une fenêtre, celle de la roulotte de Marivon.

L'elfe remis au cou son médaillon, acquièssant aux dires de Kaine, l'air songeuse. Il y avait tant de mystères, trop de questions et un manque flagrant de réponse. Illys soupira d'exaspération. De plus, Marty avait raison, il n'y avait rien de bien rassurant dans tout ce que le groupe disait. Mais, il fallait bien voir la réalité en face. À quoi bon y penser maintenant. Personne n'arriverait à rien l'esprit fatigué.

" Nous devrions tous prendre le temps de nous reposer chacun notre tour et je crois qu'il serait prudent que nous restions ensemble. Si vous êtes d'accord biensûr. Mais, avant toute chose, je crois que nous devrions allez raconter ce que nous savons à Marivon. Et, je crois que vous êtes la personne la mieux placé pour lui parler, Conrad. Vous le connaissez plus que M.Kaine et moi."

[Retour de vacances!!]

Illys se foutait totalement de la réaction de Conrad. Elle était au point ou elle en avait marre de parler et la seule idée qui lui était venu, s'était d'envoyer Conrad. Elle faisait ainsi d'une pierre trois coups. Marivon aurait son droit légitime aux informations, elle n'aurait pas à ouvrir de nouveau la bouche et elle éloignait le barde dont l'air boudeur lui tapait quelque peu sur les nerfs. Elle était fatiguée et toute confrontation aurait été trop tentante, histoire de se défouler. Surtout sur un humain.

" Nous l'attendons ou bien nous allons nous installer tout près de sa tente? Ce n'est pas bien loin." demanda-t-elle à Kaine.

La fatigue morale n'aidant pas, Amarillys contredisait déjà sa suggestion de rester groupé. Sa seule préoccupation, du moment, étant d'allumer un bon feu et de relaxer à sa chaleur.

Conrad ,quant à lui, était resté devant la porte quelques instants. Non pas qu'il avait peur de Marivon mais il réfléchissait plutôt à ce qu'il pourrait bien lui dire.
Il avait l'air affecté par la mort de Cassandra autant que pouvait l'être le ménestrel et ce dernier ne se sentait pas vraiment capable de pouvoir lui remonter le moral.

De plus, qu'allait-il bien pouvoir lui dire ? Qu'ils avaient laissé échapper l'assassin ? Conrad ne pensait pas que cela pourrait vraiment remonter le moral de l'ancien fonctionnaire.

Bref, le musicien ne savait pas quoi dire mais il frappa au bois de la caravane malgré tout et parla doucement d'une voix timide et fatiguée.

"Messire Marivon... C'est Conrad... Veuillez m'excuser mais je viens aux nouvelles..."

Il n'entendit pas tout de suite du mouvement derrière la porte. Un chaise grinça, et quelques pas lourds claquèrent cotnre le plancher. La porte s'ouvrit lentement, laissant entrevoir un Marivon fatigué. Il faisait peur à voir. Les traits tirés, les yeux bouffis, éteint, il semblait avoir vieilli de vingt ans en une après-midi.

Derrière lui, sur son petit bureau, Conrad n'aperçu qu'un gros livre relié, quelque papiers et un encrier.

"Ah, c'est vous, que ce passe t-il?"

A vrai dire, Conrad était lui-même un peu trop fatigué pour penser à détailler le visage de Marivon. Aussi, le musicien ne fut nullement choqué par le visage de l'homme qui se tenait devant lui.

Il répondit par la suite à la question du notaire avec toute l'assurance qu'il lui restait (c'est à dire très peu).

"Hum... C'était pour vous dire que Dame Amarillys et moi-même étions rentrés... J'ai cependant une mauvaise nouvelle à propos de la danseuse qui devait remplacer Cassandra pour le festival..."

Conrad hésitait à le lui dire mais il fallait qu'il sache la vérité quant à Filinia et apparemment, le moral du vieux notaire ne semblait plus pouvoir tomber plus bas. C'était donc le moment idéal pour tout lui dire.

"J'ai le regret de vous dire que Filinia a aussi été assassinée par ce même tueur..."

Suivit alors le récit du groupe avec Dame de Sombranneau et à la place de la Fontaine. Bien entendu, Conrad ne dit rien de ses gaffes avec le minotaure et du coup de seau.

Après la première déclaration sur la mort de Filinia, l'homme chercha un tabouret pour s'asseoir, les coudes sur les genoux, en proie à de noires pensées. Ce faisant, cela permit au barde de s'avancer un peu plus dans la roulotte. C'est alors qu'il aperçu, sur le petit bureau, posé à côté du gros livre sans titre, une feuille de papier épais récemment déroulé. C'était un portrait au fusain de Cassandra, avec dans le regard tout la malice et l'espièglerie de ses beaux jours, représentés avec une vie et une vérité saisissante.

Cela avait de quoi surprendre Conrad. Depuis tout le temps qu'il connaissait Marivon, il n'avait jamais su qu'il possédait un tel talent pour le dessin d'abord, et qu'il nourrissait une telle affection pour Cassandra ensuite.

Le barde termina de narrer leurs péripéties, et quelque chose fit réagir Marivon.

"Sombreanneau? d'Orkanie? Oh, ça, comme c'est... he... ha..."

S'il ne l'avait pas vu à jeun la seconde d'avant, Conrad aurait pu jurer que Marivon était ivre à cet instant, tant il était confu. Après avoir repris ses esprits au bout de cinq minutes, il s'expliqua :

"Il y a presque dix ans de celà, j'ai géré, entre autre, des investissements à Akhatla pour le comte d'Orkanie. Sa nièce n'avait que huit ans à l'époque. Et elle m'a dit une chose étrange : qu'un jour, je pleurerai à cause d'une flèche qui voudrait transpercer le ciel. Je n'ai jamais su ce que cela voulait dire."