Un nouveau jour se lève...

Guelgath, l'aubergiste, un homme bedonnant, mais à l'apparence sympathique, répondit, comme de coutume, à son salut par un sourire bienveillant. L'auberge était quasiment déserte, à l'exception des quelques clients matinaux qui venaient prendre leur petit déjeuner.

Guelgath finit de nettoyer quelques couverts avant de se diriger vers Syria.

"Tu prendras quelque chose ce matin?"

Le regard d'une étrangeté sans pareille de Syria passa dans la taverne, à la recherche d'un éventuel voyageur qu'elle n'ait pas encore eu l'occasion de rencontré, qui serait, par exemple, arrivé la nuit même...

-Non merci Guelgath, comme d'habitude.

Répondit elle doucement de sa voix aérienne.

Comme d'habitude elle ne boirait ni ne mangerait rien, et comme d'habitude, en sortant, elle laisserait discrètement tomber quelques pièces, le prix d'une boisson ou d'un repas, derrière le dos de l'aubergiste.

C'était sa façon de le remercier de sa gentillesse, et surtout de l'accueillir dans l'auberge malgré qu'elle ne consomme jamais rien...
Qu'il ait compris son manège ou non, elle s'en moquait. Tout ce qui lui importait, c'était l'amitié et la complicité de Guelgath.

Elle sembla lui sourire sous la capuche, et son regard voyagea à nouveau dans la pièce.

Pour le moment, personne de bien intéressant. Des habitués, un marchand à l'air très peu avenant qui semblait sur le point de partir, et c'était à peu près tout. Syria s'installa donc le plus confortablement possible.

Guelgath avait pu remarqué le manège de la jeune femme au fil des jours...

"Eh non, rien de bien palpitant aujourd'hui, je le crains..." lui murmura-t-il.

Syria rit légèrement. Guelgath était bien le seul à la connaître si bien...

-Oooh, allons, tu as surement quelques ragots amusants à me raconter, faute de grand aventurier pressé d'entendre les éloges des habitants?

Elle s'accouda au comptoir, penchée vers lui, l'air pressée d'entendre les éventuels commérage dont il pouvait lui faire part...

Guelgath sourit aux propos de Syria.

"Des ragots? Parce que vous pensez, mademoiselle, que l'honorable clientèle qui fréquente mon établissement s'y rend pour raconter des ragots?"

Il se mit à rire quelque peu bruyament, puis saisit son tabouret et s'assit face à Syria.

"Alors, que vais-je te raconter que tu ne saches sur notre paisible bourg et ses honnêtes habitants? Eh bien, ils accusent toujours Eldreck, le vieil ermite, d'être responsable des disparitions des bêtes dans les environs, comme si ce vieux fou était la cause de tous leurs maux. S'ils fermaient leurs clotûres, ils auraient peut-être moins de soucis avec les animaux sauvages! Le Ted, il se plaint de ça, mais l'autre matin, on a retrouvé son taureau au milieu du village!"

Guelgath rit un bon moment, puis se reprit.

"Ah là là, tu connais nos concitoyens! Combien ne cessent de se plaindre des agissements des "Esprits de la Forêt"? Enfin, les druides et les elfes veillent au grain ; tant qu'ils seront là, notre bonne vieille forêt n'aura pas de soucis à se faire."

L'aubergiste lui dit cela avec un clin d'oeil, sachant l'importance qu'avait cette partie de la forêt dans le coeur de la jeune femme.

Syria rit légèrement, puis sembla se renfrogner...

-Humpf, ils sont idiots... Eldreck ne ferait pas de mal à une mouche, je le connais!

Elle soupira, agacée. Le léger ressentiment qu'elle avait contre les humains se fit ressentir lorsqu'elle accusa:

-Ils ont toujours besoin d'un bouc émissaire pour faire oublier leur propre bêtise!

Elle sourit finalement.

-L'Esprit de la forêt... Hihi, ils croient vraiment que l'Esprit se préocupe d'eux? Ils sont bien prétentieux parfois...

Guelgath esquissa un sourire...

"Tu connais nos congénères... Ils sont pas bien malins, mais bon, par ici, ce ne sont pas de mauvaises gens."

Guelgath se releva, adressant un clin d'oeil à Syria, et reprit doucement son travail, tandis que Syria observait les clients de l'auberge... Pour le moment elle ne relevait personne digne d'intérêt.

Cependant, au boût de quelques minutes, un voyageur fit son entrée dans l'auberge. Il portait une armure de cuir sous une cape beige, et un bâton à la main. Il avait des cheveux châtains foncés qui lui descendaient jusqu'au cou, et une barbe de quelques jours. Son visage trahissait la fatigue conséquente à un long voyage. Peut-être un voyageur de passage - en tout cas, la seule personne dans l'auberge susceptible d'attirer l'attention de la jeune femme pour l'instant. Il s'avança vers Guelgath, et s'assit au comptoir, non sans adresser un signe de tête à Syria, qui était la seule déjà présente au comptoir.

"Salut à toi, aubergiste. Je désirerais juste boire un verre de lait, mais accepterais-tu aussi de donner quelques informations au voyageur que je suis?"

Le bon Guelgath lui répondit, souriant :

"Oh, bah oui, il n'y a pas de problèmes. Je vais vous chercher cela."

Le voyageur s'installa sur un tabouret, faisant le tour de la pièce du regard, puis jetta à nouveau unbref coup d'oeil à Syria, attendant patiemment son verre de lait. Il semblait légèrement nerveux.

"Salut à toi, aubergiste.

Syria adressa un sourire à Guelgath, avant qu'il ne retourne à sa tâche.
Son regard erra ensuite dans la taverne, éteint...
Une flamme s'y ralluma lorsque le jeune homme entra, l'air fatiguée, fourbu. Il lui adressa un salut auquel elle répondit poliment.

Du lait, des informations, un voyageur? Waouw, elle avait décroché le gros lot, exactement ce qui l'intéressait!

-Bonjour, messire.

Dit elle poliment, s'approchant un peu du jeune homme, parfaitement invisible sous la capuche.

Enfin arrivé à Pierremousse! Dernhelm était épuisé. Dans son empressement à arriver à Pierremousse, il avait passé une dernière nuit plutôt courte. L'essentiel était maintenant de recueillir des informations. *Peut-être arriverai-je à trouver un endroit paisible où demeurer quelques temps*

C'est alors qu'il vit la personne à ses côtés lui adresser la parole, d'une voix vraisemblablement féminine, tout en gardant sa capuche abaissée. Assez intriguant pour ainsi dire, mais bon, soit, chacun était libre de garder ses secrets s'il le désirait.

"Bonjour à vous, mademoiselle."

Il avait déclaré sa phrase tout en souriant, sur un ton qu'il avait voulu le plus agréable possible.

La voix aérienne de Syria comblait le fait qu'on ne puisse voir son visage: chaleureuse, douce, amicale. Il ne faisait aucune doute que sous la capuche, la jeune femme souriait.

-Vous êtes voyageur, avez-vous dit?

Elle posa sur le comptoir ses deux mains, invisibles elles aussi, cachée des les ondulations de sa cape, qu'elle avait ainsi enroulée un peu comme des manches.

Dernhelm sourit. Rares étaient les personnes à s'intéresser à lui et à ses voyages, encore plus au premier contact. Généralement, il en venait à avoir des discussions intéressantes avec de telles personnes...

Et puis la jeune femme, cachée derrière sa capuche, mais à la voix si particulière, l'intriguait de toute façon...

"Oui, je suis voyageur. J'arrive tout droit de Bérégost, dans les terres situées au nord de l'Amn. Je découvre à peine cette contrée, où mes parents ont jadis habité... Et vous-même, êtes-vous une voyageuse également?

Elle hocha doucement la tête:

-Non, moi j'habite ici, bien que j'aie déjà voyagé.

Puis, de l'intérêt et de la curiosité dans la voix:

-Je ne connais pas Bérégost, comment est-ce?

L'aubergiste amena son lait à Dernhelm, qui, souriant, lui répondit un "Merci!" enthousiaste.

"Bérégost, vous disiez? Eh bien, c'est un bourg classique comme on en trouve des dizaines au sud d'Eauprofonde. Oh, les habitants n'y sont pas antipathiques... Mais bon je n'y ai pour ainsi dire pas trouvé ma place. Mais si vous habitez par ici, je peux vous posez une question alors?

Ce village a l'air assez paisible, non? Dites-m'en plus sur Pierremousse!"

Avec un large sourire sans aucun doute, Syria se mit à réciter, l'air fière de ses connaissances:

-C'est un village assez calme, quoique mouvementé par les voyageurs qui s'y arrêtent régulièrement, pour demander conseils aux druides ou aux elfes, et pour se ravitailler et se reposer...
Les habitants sont parfois amusants, ca fait un des charmes de Pierremousse...

Elle échangea un regard entendu et amusé avec Guelgath.

-Et vous, vous venez seulement pour vous reposer, ou vous voulez des conseils?

Elle semblait prête à lui en donner, vue son intonation.
Syria était charmante, manifestement prête à rendre mille services...

A ce moment-là, une vive rumeur leur firent dresser les oreilles. Dehors, il y avait une certaine agitation qui montait. Puis, un halfelin franchit le seuil de l'auberge du bon Guelgath. Gilet en cuir clouté à multiples poches, arbalète pliante en bandouillère, deux coutelas à la ceinture, voilà assurément un aventurier. Un halfelin aventurier. Pourquoi pas? Jusque-là, rien de bien anormal. Mais la personne que le suivait l'était en revanche beaucoup plus.

De taille humaine, mais plus large d'épaules, une grande tignasse brun-rouge sombre presque noire d'où dépassaient une paire d'oreilles ornées d'anneaux, encadrant un visage rougeaud animal, et de grosses patasses velues maintenant fermemant deux grands sacs en travers de ses épaules. Ajoutez à cela des vêtements de cuir noir et rouge, une épée large battant les hanches et un bouclier rond sur le dos, et vous aurez le portrait d'un hobgobelin type.

Un hobgobelin, en plein milieu de l'auberge de Guelgath! De quoi alimenter les conversations pour les années à venir.

Malgré son envergure, le monstre faisait très peu de bruit en marchant. Il suivait de près le halfelin le plus naturellement du monde, sans vraiment prêtait attention à son entourage. Une fois arrivé au comptoir, le halfelin grimpa sur un tabouret pour être à niveau, puis décrocha deux grandes outres pendues autour du cou de son étonnant camarade et s'adressa à un Guelgath abasourdi.

"Bonjours mon gars. Pouvez-vous nous recharger de votre meilleur alcool? Nous avons un long voyage à faire."

"Euh... oui bien sûr..." L'aubergiste saisi les outres dans un état un peu second, pour aller les remplir.

Le hobgobelin garda un silence de bon aloi. Et le halfelin jeta un coup d'oeil aux alentours avec un grand sourire, histoire de dire 'tout va bien braves gens'.

Dernhelm sourit. il était rare qu'il rencontre des gens serviables ainsi prêts à l'aider sans rien demander en retour.

"A vrai dire, c'est un peu les deux. Cela fait quelques années déjà que j'e voyage sans guère de halte, et je voulais découvrir le Téthyr, la terre où sont nés mes parents, et si possible m'y installer pendant quelques temps, dans un village paisible comme celui-ci..."

Oui, la tranquilité... C'était ce à quoi il aspirait par-dessus tout. Et Dernhelm sentait même qu'un temps de repos serait le bienvenu. Et il était vrai que ce village semblait paisible, et proche de la Forêt du Téthyr, qu'il aurait bien aimé visiter...

Si paisble? Hum, peut-être avait-il parlé un peu trop vite... Voilà que de l'animation se faisait entendre au dehors...

*Pas encore une bagarre j'espère...*

Et puis l'halfelin fit son entrée, suivi... d'un hobgobelin !? Dernhelm ne put réprimer un sourire face à ce duo pour le moins insolite. Il se demandait surtout si la présence d'une telle créature n'animerait pas l'hostilité des villageois, et porta un regard interrogateur tour à tour à son interlocutrice puis à l'aubergiste également.

Syria n'eut pas le temps de répondre, qu'un bruit d'agitation se fit entendre à travers la porte.
La jeune femme vit deux solutions: la première, les rumeurs étaient présage d'agitation de caractère bagareuse...
La seconde: quelqu'un de très... intéressant arrivait.

Syria se redressa un peu, fixant la porte. Son entousiasme fut difficile à cacher lorsque l'halfelin et l'hobgobelin pénétrèrent l'établissement.

-Oooh...

Ne put elle s'empêcher de murmurer.

-Bonjour!

Dit elle ensuite à l'adresse de l'halfelin, alors qu'il se tournait vers elle comme vers les autres clients, apaisant.

Le hobgobelin se contenta de lui jeter un coup d'oeil noir. Le halfelin, lui, fit un salut de la main sans se départir de sa bonhommie. Intérieurement il devait se demander ce qu'elle pouvait bien lui vouloir.

-Héhé, oui, c'est cela, bonjour.

Gueldath posa les outres remplies devant lui. Le halfelin sorti de sa poche une généreuse poignée de pièce d'or, qui teintèrent agréablement sur le comptoir. S'assurant que les sacs tiennent seuls sur ses épaules, le hobgobelin étendit sa grande main poilue pour saisir les outres et les remettre autour de son cou. Visiblement, tout les deux ne tenaient pas à s'attarder outre-mesure, ce qui était fortement compréhensible du point de vue du hobgobelin.

Le comportement des voyageurs étaient compréhensible, mais ce qui était plus surprennant, c'était les pièces d'or dont ils venaient de faire étalage! Oh, l'argent, cela n'intéressait guère Dernhelm, mais d'expérience, le jeune homme se doutait bien qu'un hobgobelin et un halfelin dotés d'une bourse bien garnie attirerait sans aucun doute l'attention...

"Vous semblez pressé, messire hin", dit-il en souriant.

Dernhelm était perspicace, autant d'or ne tarderait pas à parler de lui même. Bien qu'avec un guerrier hobgobelin pour le protéger, les candidats au vol réfléchiraient à deux fois avant de tenter le diable, et le halfelin semblait également capable de se défendre seul. Les yeux de ce dernier étincelèrent quand Dernhelm le qualifia de hin, les halfelins de la Luiren.

"Disons que j'ai nombre de chose à faire, messire rôdeur..."

Par cette réponse, il montrait que lui aussi était assez observateur pour repérer en Dernhelm un homme des bois. Le hobgobelin restait immobile, les mains sur les sangles de ses sac, mais ses petits yeux noir comme des billes de charbon scrutaient l'humain comme pour déterminer s'il pouvait être une menace potentielle.

Dernhelm adressa un sourire à l'halfelin, puis prit sa chope et bu une gorgée de lait. Enfin, il se retourna vers l'halfelin et lui dit sur le ton le plus chaleureux possible.

"Eh bien, en ce cas, quelle que soit votre destination, je vous souhaite un bon vent pour la suite de vos voyages."

Et c'était tout le mal qu'il leur souhaitait! Si d'vaenture leurs intentions étaient bonnes, ces deux compères auraient du mal à se tailler une route dans la région... Mais au vue de leur bourse, ça ne semblait pas être un problème en fin de compte...