Sous les feuilles du Yuir

A cette question, le sourire de la jeune elfe se perdit lentement. On la mettait donc à l'épreuve? Non, c'était juste une question anodine.¤Allez calme toi, on ne te veut aucun mal, c'est juste une question pour savoir.¤

Edelinda força le sourire à revenir se planter sur ses lèvres, elle s'étira rapidement et revint croiser ses bars devant elle. Elle s'enfonça plus confortablement dans le coussin et entama sa réponse...

-Et bien, si je suis envieuse de rejoindre votre clan, oui sans aucun doute, je cours les routes depuis une éternité, et je veux retrouver le calme et la sérénité d'une famille au milieu de la forêt, avec des personnes comme moi. Que puis je rêver de mieux qu'ici même? Alors je dis oui je suis envieuse de rejoindre votre clan. Si j'en suis digne, ce n'est pas à moi de juger, mais à vous. Si vous attendez de moi que je vous racontema vie, alors je vous dis non, car personne n'a le droit de juger mon passé autre que moi, et je me force moi même chaque jour à effacer ce sombre passé, alors ne me forcez pas à y revenir. Vous pouvez me juger sur ce que je suis aujourd'hui, et comment je vous suis apparu.

Le sourire sur le visage de l'elfe avait complètement disparu, elle savait que le moment le plus important de l'entretien était arrivé, et elle ne devait rien lâcher, elle devait saisir sa chance.

Le visage de l'elfe restait impassible, mais Edelinda y perçut un soupçon d'éclaircissement, de détente.

-Vous avez raison, la valeur ne se juge sur rien d'autre que les actes, et c'est ce que nous enseignons ici-même. Je ne vous questionnerai donc pas sur votre passé. Mais j'aimerais connaître certaines choses. Vous avez l'air taillée pour le combat, et quelles sont donc vos armes? Ce bâton peut-être, qui vu votre jeune âge n'est pas là pour vous soutenir.

Edelinda sourit à la réponse de l'elfe. Visiblement, il n'avait pas mal prit sa réponse, qui aurait pu paraître insolente, et avait basculé sur un sujet qu'Edelinda appréciait beaucoup plus. Elle se détendit un peu, passa la main dans la fourrure de son chien, d'un geste automatique quand elle cherche la chaleur et le réconfort, et répondit après un petit rire:

-"Si je suis taillée pour les armes, je n'en sais rien, personne n'est taillé pour combattre, mais on m'a appris tout de même, alors j'ai certes quelques aptitudes. Ce bâton est en effet l'arme dont je me sers, et avec lequel j'ai toujours combattu, vous savez, ma tribu ne s'est jamais défendu qu'avec poings et bâtons. Mais détrompez vous, malgré mon jeune âge, à la fin d'une journée il est aussi fort utile pour marcher, histoire d'alléger un peu les jambes.

Edelinda ne voulait pas paraître désobligeante, mais elle avait envie de revenir dans le vif du sujet, à savoir la question de son admission. Néanmoins, ces questions lui paraissaient comme une évaluation, et l'elfe était fin et perspicace, elle ne devait pas perdre son sang froid, faire d'erreur, ou laisser échapper quelque chose qu'il ne fallait pas, elle devait rester concentrée.

-Très bien Edelinda, le bâton peut en effet être redoutable entre des mains fortes et habiles. Et j'imagine que Korolenko peut s'avérer un allié de taille, tant pour repérer des ennemis que pour les combattre, remarqua t-il en regardant le loup. Visiblement, l'elfe portait beaucoup d'attention aux compétences martiales de la jeune femme. "Vous aurez cependant besoin d'un arc, que nous pourrons sans doute vous fournir."

Il adressa un sourire qui n'était plus, cette fois, dénué de sens. C'était un signe de bienvenue, accueillant et chaleureux.

-Vous êtes quelqu'un de très intelligent, et j'apprécie votre franchise et votre modestie. Il n'y a aucune raison pour que je ne vous accepte pas parmis nous. Je m'appelle Aramil Liadon, se présenta t-il en baissant la tête. Il but le fond de sa tasse, puis se leva agilement. "Nym! Fais visiter le camp à mademoiselle, le temps qu'elle s'y familiarise."
Un elfe de la lune assez grand, à peu près du même âge qu'Edelinda, quitta son poste à l'entrée pour pénétrer dans la large tente.

-Quant à moi, je vais vous laisser, j'ai à faire, dit-il en se courbant à nouveau. "Faites connaissance avec les autres." Sur ce, il souleva le pan de l'ouverture de la tente, et s'en fut.

Les paroles et le sourire de l'elfe montraient qu'elle avait marqué un bon point. Elle aurait aimé pouvoir lui répondre, le remercier, mais il s'en était aller bien vite. Heureusement, elle était enfin a peu près admise, en tout cas, cela en avait pris le sens. Elle devait juste bien se tenir, être correcte et ne pas s'énerver.

Elle avait rapidement salué Aramil quand il était parti, puis s'était retournée vers l'autre elfe qui semblait être surnommé Nym. Elle s'inclina à nouveau avec un profond respect puis se présenta:

-Bonjour à vous, Nym, si je puis vous appeler comme ça et si ce diminutif n'est pas trop désobligeant. Je vous remercie de prendre de votre temps pour moi, et j'espère que je ne vous dérange pas trop. Je me prénomme Edelinda, et voici Korolenko. Nous vous suivons où vous voulez nous emmener. Elle ponctua sa phrase par un sourire qui se voulait charmeur mais pas vulgaire, un petit sourire coquin et sympathique.

-Enchanté, dit Nym avec le traditionnel salut elfe. Il sembla surpris par le petit signe charmeur d'Edelinda, mais flatté. Il y répondit par un sourire timide. "Cela ne me dérange pas du tout! Mon nom est en fait Nymlodel, mais personne ne me nomme plus ainsi. Alors, ne vous sentez pas gênée." Cette remarque était osée de la part du jeune elfe, qui avait l'air bien plus troublé par sa comparse "sauvage" qu'elle ne l'était elle même.

Il quitta la tente, invitant Edelinda à le suivre. Nym portait ses cheveux blancs bleutés assez court, et était très vif et fin. Ses yeux étaient aussi très clairs et pétillaient de joie et d'énergie. L'atmosphère était plus fraîche à l'extérieur, mais le soleil était haut dans le ciel et son contact était agréable sur la peau de la jeune elfe. L'agitation régnait toujours dans le camp en construction. Cependant, tous travaillaient dans un silence relatif et avec un grand respect de la forêt : Très peu d’arbres verts étaient coupés, et le relief de la clairière n’était pas abîmé. Nym emmena Edelinda vers le nord du camp où des palissades étaient en train d’être élevées, là où les rochers et la végétation ne constituaient pas des remparts suffisants. Au delà, une pente abrupte menait –à en juger par les bruits de cascades- à un torrent. C’est dans cette partie du camp que se trouvaient les vivres et les armes, ainsi que la tente dédiée aux soins des blessés.
Plus à l’ouest, trois gros ormes délimitait ce qui servirait de terrain d’entraînement, tant pour l’arc que le corps à corps. C’est au sud et à l’est que se trouvaient la plupart des tentes des elfes et des demis elfes. Assez vastes mais espacées les unes des autres, elles fournissaient un abris pour quatre ou cinq personnes chacune. Bien que leur couleur s’accordait bien avec celle de la forêt environnante, des fougères et autres branchages y étaient placés afin de les rendre moins repérables.
Nym semblait enchanté de faire visiter le camp à la jeune elfe, et y mettait tout l'entrain dont il était capable.

-Notre compagnie s'appelle les Galamne, les "murmures du chêne", déclara t-il avec fierté. Si vous avez besoin de quoi que ce soit d'autre, je suis à votre service. Il adressa un clin d'oeil à Edelinda. "Le soir ne tardera pas à tomber... Que diriez vous d'aller boire un..."
Survenant de derrière lui, un grand elfe l'interrompit. Levant les yeux vers ce dernier, Edelinda reconnut Aramil, le chef des Galamne.

-Tu ferais mieux d'aller aider tes compagnons, Nym, dit-il sévèrement. "Et deux bras de plus seraient les bienvenus, Edelinda." Puis il repartit vers le centre du campement. Visiblement, la jeune elfe sauvage devait elle aussi se mettre au travail. Les tâches ne manquaient pas, et elle n'avait que l'embaras du choix. Nym fit un sourire et gêné, se détourna et commença à monter une tente à quelques pas de là.

Edelinda n'avait nullement l'intention de désobéir aux premières consignes qu'on lui donnait, et ne trouva même pas que la décision du chef était rébarbative et embêtante. En effet, elle était heureuse de rencontrer un meneur d'homme, qui savait travailler d'arrache pied pour le bon devenir de son peuple, et elle n'avait pas de raison de ne pas en faire autant pour sa future tribu.

Néanmoins, elle trouvait le jeune elfe nommé Nym charmant, et elle aurait trouvé dommage que leur échange s'arrête là. Comme il s'était dirigé vers l'une des tentes en installation pour apporter son aide, elle fit de même, et reprit avec un sourire sur le ton de la conversation...

-Très joli nom, très poétique, mais ce que je n'arrive guère a saisir, c'est coment et pourquoi vous êtes vous ainsi rassemblés pour former une tribu, Aramil est-il à la base de ce rassemblement. Et d'ailleurs, ce terrain d'entrainement me fait réver, quand sera-t'il disponible, m'y accompagneriez vous. Un peu timide suite à sa demande, Edelinda ne tourna pas ses yeux vers l'elfe et resta concentrée sur son ouvrage, puis elle ajouta:"Korolenko peut peut être aider à quelque chose, il est assez fort, et pourra aider à pousser des objets, ou bien servir de chien de garde, je pense qu'il en est capable.

Nym tendit un coin de la large peau tannée qui servirait de toit à la tente.

-En fait, il existe de nombreux groupements de ce genre dans la forêt de Yuir. Ils existent tous depuis très longtemps, dans le but de protéger la forêt des envahisseurs, surtout des colons humains et des Sorciers Rouges, qui tentent d'exhumer les secrets magiques qui nous appartiennent. Les Galamne ont subi il y a quelques années une lourde défaite, et en sont sortis complètement dispersés et affaiblis. Mais Aramil, qui n'était alors qu'un simple guerrier, a réussi à rassembler de nouveaux membres à notre cause et à regrouper les survivants. C'est ainsi que les Murmures du Chêne renaquirent de leurs cendres, et qu'Aramil est devenu notre chef. Quant à moi, je suis un tout nouveau membre, et je découvre que la vie avec eux n'est pas de tout repos... Mais je suis au service de Yuir, et c'est tout ce qui compte.

En quelques minutes, la tente fut montée. Elle mesurait près de trois mètres de long pour un mètre soixante de large, mais seul un gnome ou un halfelin pouvait s’y tenir debout.

-D’accord, nous iront ensemble, répondit le jeune elfe, enchanté. Je combat surtout à la rapière, mais je me débrouille aussi à l’arc. Et vous ? Puis il jeta un regard au loup. Je pense qu’il serait mieux à la garde, mais il est peut-être aussi capable de suivre des pistes ? Ca pourrait nous être utile, surtout s’il reconnaît l’odeur de certaines créatures en particulier.